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26 Jan

L'heure automnale.

Publié par Maroussia

Elle n'avait plus besoin de mettre de réveil, elle se réveillait naturellement à l'heure voulue à force d'habitude. Elle restait étendue dans son lit à observer les fins rayons de lumières passer à travers les rideaux. Ces fins rayons qui finissaient par s’abîmer sur le mur au-dessus de sa commode. La lumière avait changé, ce n'était plus celle de l'été, l'automne avait finit par arriver et ses rayons frais et timides étaient là. Elle commençait à ressentir une pression sur sa vessie, elle compris que le moment était venu de se lever, bien que la chaleur des draps ne veuille pas la laisser se séparer d'eux. Elle passa en position assise sur le bord du lit et comme chaque matin le fait de plus pouvoir apercevoir ses pieds la fit esquisser un sourire timide. Elle se leva non sans mal et se dirigeât à pas lents tout en s'étirant vers la salle de bain. Elle se vit dans le reflet du miroir et son sourire s'agrandit lorsqu'elle aperçut son ventre très arrondit qui prenait tout le tissu de son haut de pyjama. 

 

Il devait être dix heures lorsqu'elle entama son chemin vers l'épicerie qui se trouvait à deux kilomètres. L'air était frais, de la condensation s'échappait de son souffle sur le chemin. Elle continuait de saluer les voisins qu'elle croisait, même si ces derniers ne faisaient que la fixer avec mépris. Elle reprit le chemin inverse avec sa brique de lait, sa demi-douzaine d'œufs et ses quelques légumes dans son sac. Il en était de même dans les rues du centre, ils se contentaient de la fixer sans daigner répondre à ses saluts. Elle s'y était habitué et cela ne la faisait plus pleurer. Elle arrivait au niveau de son allée lorsqu'elle glissât sur une feuille d'érable humide, elle ne pu éviter la chute, mais réussi à mettre ses mains et ses genoux pour supporter le choc et éviter de heurter son ventre sur l'asphalte. Elle resta quelques instants immobile pour reprendre ses esprits et surtout envisager de se relever seule. Elle aperçu son voisin et le héla en tentant de se surélever pour être sûre qu'il la voit. Il passa son chemin et referma froidement sa porte. Elle tenta difficilement de changer de position pour s'accroupir, mais sans succès. Essoufflée et coincée elle s'arrêta le temps de reprendre son souffle et contempla le ciel bleu un court instant. Elle dût plisser les yeux, la luminosité froide de l'automne était presque trop crue. Elle réitéra dans un dernier élan ses tentatives pour se relever et entendit une voiture s'arrêter tout près puis une portière claquer. Le temps de relever les yeux et il était déjà à ses côtés. L'agent de police la soutint sous les aisselles pour l'aider à se relever. Il émit un petit souffle d'effort lorsqu'il dut la soulever, il est vrai qu'elle avait pris quelques kilos avec la grossesse. Ils se surprirent tous deux à soupirer de contentement après qu'elle se soit relevée avec succès. Elle commença alors à rire de la situation, un rire léger et communicatif qui ne mit pas longtemps avant de se transmettre à l'agent en service. Il ramassa le sac de provisions qui se trouvait encore au sol et reposa son regard sur elle, il dit alors:

-Vous allez bien madame ? Vous voulez de l'aide pour rentrer chez vous ?

Elle repris alors son souffle. L'air frais saisissant les parois de sa gorge. Elle posa les mains sur ses hanches et baissa les yeux. Les sanglots commencèrent à secouer ses épaules. Il se retrouva alors désemparer à lui demander:

-Vous allez bien ? Vous êtes blessée ? Je peux appeler quelqu'un si vous voulez...

Elle se contenta de pointer sa porte d'entrée de son doigt secoué des sanglots amères. Il la guida sur l'allée en la soutenant d'une pression légère sur son coude et le sac contenant les quelques provisions battant contre sa cuisse. Il la fixait d'un regard digne d'un enfant inquiet. Arrivé au niveau de la porte il glissa les clés qu'elle lui tendaient dans la serrure avant d'entrouvrir la porte. D'une main elle attrapa le sac qu'il tenait encore et se glissa derrière la porte pour se dissimuler. Elle commença à refermer la porte sur lui en lui disant d'une voix faible un "merci" glacial. Il entama sa phrase par:

- Attendez ! Vous n'avez pas l'air...

Il n'eut pas le temps de terminer puisqu'elle l'interrompit par le claquement de la porte. Il commença à faire quelques pas de recul avant de repartir soucieux vers sa voiture.

 

Elle restait plantée derrière la porte à plonger son regard dans le flou de la pièce à se demander pourquoi elle s'était mise à pleurer comme ça. Elle se mit en mouvement pour se débarrasser des vêtements humides qui portaient encore les marques de sa douleur. Après avoir retiré les différentes couches de vêtements elle se trouvait en culotte et en débardeur dans l'entrée, elle commença alors à caresser amoureusement son ventre. Elle sentait la vie qui l'habitait, son ventre démesuré semblait occuper toute sa vie désormais. La chaleur de la pièce éveilla un picotement sur les plaies qu'elle s'était faite lors de sa chute, ses genoux bleuis et tuméfié allaient être douloureux pendant quelques jours encore. Quant à ses mains, de petits lambeaux de peau se présentaient sur ses paumes rougies et par endroits même légèrement ensanglantés. 

 

Elle se prépara une omelette aux légumes, les oeufs s'étant brisé lors de sa chute elle n'avait pas le choix. Après le repas elle s'installa pour lire dans le salon, mais le silence était trop pesant. Les mots n'avaient pas de sens lorsqu'ils se présentaient à elle, les phrases semblaient sans fins. Elle se sentait nauséeuse et elle mit cela sur le compte des oeufs. Elle décida d'écourter sa soirée pour se diriger, comme fiévreuse, vers son lit. 

 

Lorsqu'elle se réveilla ce matin-là elle semblait tout droit sortit d'un cauchemar. Le souffle court, elle tentait tant bien que mal de s'habituer à la luminosité de la pièce, la migraine pointait. Malgré ses efforts tout son corps semblait engourdi et douloureux, comme courbaturé. Son souffle semblait se calmer difficilement, mais douloureux à sortir de ses poumons. Les larmes coulaient d'elles mêmes au coin de ses paupières. Elle tenta d'effectuer un mouvement pour s'asseoir sur le bord du lit, mais le seul résultat fut un cri de douleur qui s'échappa malgré elle de ses mâchoires contractés. Elle tenta de reprendre son souffle une fois encore, allongée dans son lit, la douleur était tellement forte que des gouttes d'une sueur froide et amère se mêlaient à ses larmes. Elle tenta une dernière fois de s'asseoir, mais la douleur combiné à l'effort la fit s'évanouir. 

 

Lorsqu'elle s'éveilla la vision rassurante du plafond de sa chambre fut vite éclipsé par la luminosité faible. Il était tard, très tard à en croire la course du soleil sur le mur. Comment avait elle pu dormir autant ? Courbaturée elle prit appuie sur ses coudes tremblant pour se relever dans son lit. Contrairement à ce qu'elle aurait cru elle pu s'asseoir sans difficultés. Son ventre ne bloquant pas ses mouvements et pour cause, il était plat. Pas le moindre arrondi, son ventre proéminent de huit mois passé n'était plus là. En un geste furieux et en retenant son souffle elle souleva son débardeur, désormais trop grand. Rien, il n'y avait plus aucun signe de sa grossesse. Elle griffa son ventre et attrapa le peu de matière qui s'y trouvait, mais rien ne signalait une grossesse. Elle se rua dans la salle de bain, en quête d'une trace de vie, de sang ou d'une présence. En dehors de son corps douloureux il n'y avait rien ni personne dans la maison. Elle commença à douter, les mains posées sur son ventre vide elle se demandait si son imagination aurait pu être assez forte pour lui imposer ça. Elle en venait à douter de sa santé mentale. Elle s'habilla à la hâte et se dirigea chez ses voisins, elle frappa furieusement à la porte jusqu'à ce qu'une silhouette mince ornée de cheveux courts poivre et sel vienne lui ouvrir. à bout de souffle elle lui demanda s'il avait vu son bébé, s'il avait vu qui avait pris son bébé. Il se contenta de refermer la porte en lui jetant un regard de désarroi. Elle continua à frapper aux portes de ses voisins, leur demandant s'ils savaient ou il était. Personne ne lui répondit, elle n'eut droit qu'à des regards sombres et des hochements de têtes désapprobateurs. Le souffle court elle tentait de reprendre ses esprits en scrutant le ciel tout en enfonçant ses ongles dans ses paumes encore douloureuses de la veille. 

 

Elle entendit alors le vrombissement d'une voiture qui s'engageait dans la rue, les phares commencèrent à dessiner des motifs sur la route d'asphalte. Elle scruta pour voir le véhicule qui s'approchait, l'allure de la voiture faiblit avant de s'arrêter à son niveau. La lumière des phares l'éblouissant elle ne vit pas immédiatement de qui il s'agissait, mais la voix de l'agent de police lui paraissait encore familière de la veille. Le simple fait d'entendre ce "bonsoir" eu l'effet d'un baume au cœur. 

Il commença à balbutier:

- Que... Comment... Qu'est-ce qui vous est arrivé ? Ou est votre bébé ? Vous devriez encore être à l'hôpital, non ? 

Mais rien qu'en croisant son regard il comprit que quelque chose n'allait pas. Elle lui expliqua ce qui lui était arrivé, ou plutôt ce qui ne lui était pas arrivé. Il l'a fit monter sur le siège passager du véhicule de service et il commença à conduire en lui jetant des coups d’œil fréquent, comme si elle allait à son tour disparaître s'il la quittait des yeux ne serait-ce qu'une seconde. Il essayait tant bien que mal de prendre une décision sur ce qu'il devait faire, ou il devait la conduire. Il compris qu'il devait la ramener au commissariat. La situation était tellement floue, il réussit à reprendre le fil de ses pensées et réalisa qu'il allait manquer la route. Il prit un virage un peu brusque qui leur coupa, à tous les deux, le souffle. Elle dit alors:

-Non, c'est pas par là ! PAS PAR LA

Elle tira le volant vers elle, mais il réussit à freiner. Elle plongea son regard dans l'obscurité de la nuit qui les recouvrait. Elle avait les larmes aux yeux, il ne dit rien. Il reprit son levier de vitesse pour faire une marche arrière. Ils reprirent la route sans se dire un mot. Ils virent tous deux un éclat se refléter dans le rétroviseur, avant qu'ils ne puissent constater de son origine un couteau de chasse se planta dans la gorge du policier. Elle poussa un cri d'effroi en voyant la lame trancher la chaire et s'enfoncer profondément. La voiture finit dans le fossé, sa tête heurta violemment le tableau de bord sans que l'airbag ne se déclenche. Dans la nuit deux points rouge perçait l'obscurité, si on se rapprochait on pouvait également voir la fumée se dégager du capot, les roues arrières surélevées et le moteur enfoncé dans le talu. Il n'y avait personne, le silence devenait assourdissant dans la nuit. 

 

Elle se réveilla parce qu'elle avait froid et soif, sa gorge était sèche. Le sang séché sur son front tendait sa peau et la démangeait. Elle repris lentement ses esprits. La lumière était artificielle et tout était froid, une sorte de bourdonnement créé par les néons envahissait l'espace. Elle se mit sur le côté, encore sonnée de son choc à la tête. Elle entendit des pas lourds provoquer un grincement sur du bois. La silhouette remontait l'escalier et verrouilla une porte après son passage.

Elle se retourna, toujours étendue sur le sol en béton elle scruta la pièce. Elle avait le souffle court, allongée sur le ventre sa respiration remuait la poussière qui se trouvait sous elle. Il y avait un drap tâché qui recouvrait un corps dans l'angle gauche de la pièce. Elle se releva et commença à avancer lentement dans cette direction. Un pieds dépassait du drap. Elle s'accroupie et posa délicatement sa main sur la surface du tissu, comme pour le caresser. Sa main resta un instant en suspend au-dessus du tissu, si elle ne voyait pas le corps il ne serait pas vraiment mort. Elle finit par tirer le tissu vers elle, dévoilant finalement le corps de l'agent. Elle comprit rapidement que la tâche brune sur le tissu correspondait à la plaie béante qu'il avait à la gorge. Il lui manquait un bras également, ce n'est qu'en constatant de son absence qu'elle fut intriguée par le petit clapotement discret qui se faisait entendre. Elle se releva et se dirigea vers le coin qui n'était pas éclairé, à l'opposer de la pièce. Un baril bleu était là, un bouillonnement se formait à la surface avec ce qu'elle devinait être le bras manquant de l'agent. Une fumée aigre se dégageait de la mixture. En voyant la chaire se décomposer elle comprit qu'il s'agissait d'acide. Si son bébé n'était pas étendu sous le drap aux côtés de l'agent, il ne pouvait être qu'ici. Elle fixa les bulles qui explosaient à la surface du liquide. 

 

Elle plongea les mains dans le baril, le cri qu'elle poussa s'échappa d'elle sans qu'elle puisse espérer le contrôler. La douleur était telle qu'elle tomba à genoux elle vit sous son regard ahuri ses bras fumant sous l'érosion de ses chaires par l'acide. Elle se releva et replongea ses bras au plus profond du baril, elle continua à pousser des cris mais la douleur n'était plus un frein. Elle remontait une purée molle à la surface, un mélange de ses chaires et de toutes celles que le baril pouvait contenir. Elle continua à plonger ses bras dans le liquide, à le brasser en espérant retrouver son enfant. La scène donnait l'impression que le baril l'avalait, que ce baril était un tunnel sans fond qui la conduirait vers ce qu'elle cherchait. Puis finalement elle s'effondra, ses bras étaient rongés jusqu'à l'os à certains endroits. Ses phalanges étaient déjà en grande partie rongées. Elle était là, à demie assise contre le mur. Les bras fumant et dégageant une odeur nauséabonde. Ses yeux étaient révulsés, son cœur avait lâché sous le coup de la douleur. Elle restait là, immobile et meurtrie. Les néons qui se trouvaient à l'opposé dans la pièces nous laissaient deviner une silhouette qui semblait assoupie, le menton posé sur la poitrine et les ombres cachaient la douleur figée de ses traits.

L'heure automnale.
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